Aujourd'hui, nous ne luttons pas pour reconquérir la situation de puissance régional ; nous avons à combattre pour l'existence de notre patrie, pour l'unité de notre nation.

Avec neuf frontières extérieures, la position géographique stratégique du Congo-Zaïre peut se reveler un élément de sa vulnérabilité si un Etat fort n'est pas restauré,et si la paix n'est pas rétablie et maintenue, si la stabilité n'est pas assurée et garantie dans la région des grands lacs et dans toute l'Afrique centrale

Le Congo-Zaïre a été désarticulé avec les troubles qui ont précédé et suivi l'évolution des troupes rebelles vers Kinshasa, capitale de la République, en 1997. Aujourd'hui, il convient de restaurer son intégrité territoriale. Cette restauration implique, malheureusement, une confrontation militaire afin de faire reculer les troupes d'occupation. Il faudra simultanément mettre en œuvre les mécanismes internationaux de protection des droits territoriaux du Congo-Zaïre dont le fondement se trouve inscrit dans le principe de l'uti possidetis iuris garantissant l'intangibilité des frontières.

Mais croire que l'on peut, comme par enchantement, rétablir l'intégrité territoriale du Congo- Zaïre, rétablir et maintenir la paix dans la région des grands lacs par l'application de seules solutions classiques onusiennes et de solutions purement africaines qui ont démontré leur inefficacité en l'espeÌ€ce, releÌ€ve d'une vision onirique. On soutiendra ici que la crise qui déchire le Congo-Zaïre est réfractaire aux procédures classiques de reÌ€glement non coercitif de conflits pour plusieurs raisons : la nature non négociable de certains de ses enjeux (intégrité territoriale du Congo-Zaïre, l'exercice exclusive de sa souveraineté), le nombre de parties au conflit (7 Etats plus les groupes rebelles Congolais, Ougandais, Rwandais et Burundais), le manque de volonté politique d'aboutir à un reÌ€glement pacifique, la mentalité solipsiste de la partie tutsi et, enfin, l'absence d'une doctrine d'action clairement affichée par le Conseil de sécurité pour contraindre les armées Ougandaise et Rwandaise de quitter le territoire du Congo-Zaïre.

L'UNIR MN est, malheureusement, convaincue que la crise qui déchire le Congo-Zaïre appartient à une catégorie bien particulieÌ€re de conflits : celle dont le reÌ€glement est normalement concevable sous l'effet d'une intervention coercitive extérieure armée ou non armée de l'ONU, d'une organisation régionale mandatée par celle-ci ou, encore, d'une coalition ad hoc d'Etats agissant avec le blanc seing de l'Organisation mondiale. Il faut une véritable diplomatie coercitive pour mettre fin à ce conflit.

Nous devons eÌ‚tre réalistes et solliciter, sur la base du chapitre VIII et de son article 53§1 de la Charte des Nations Unies, l'intervention soit de l'OTAN, ou soit de l'UEO pour la mise en Å“uvre des Accords de Lusaka : accords qui doivent eÌ‚tre révisés au préalable par la prise en compte des éléments propre à l'exercice exclusive de sa souveraineté par le Congo-Zaire et de son indépendance politique.

Cette intervention doit également être l'occasion pour l'application effective de diverses résolutions adoptées depuis le 2 août 1998 par le Conseil de sécurité sur le fondement du chapitre VII de la Charte, dans lesquelles il a affirmé et réaffirmé la nécessité de respecter la souveraineté du Congo-Zaïre, condamné les massacres et autres atrocités et violations du droit international humanitaire commis au Zaïre/RDC, et, d'autre part il a exigé le rétablissement et le maintien de la paix dans la région des grands lacs.

Une telle intervention, qui suppose l'autorisation préalable du Conseil de sécurité, serait légitimement une variante de la Résolution Acheson du 3 novembre 1950 sur l'union pour le maintien de la paix: c'est l'incapacité du Conseil de sécurité à décider l'emploi de la force coercitive, à déployer, diriger, commander les opérations contre les responsables de menaces à la paix, de rupture de la paix et d'actes d'agression, à rétablir et maintenir la paix dans la région des grands lacs, qui jusfierait l'action en quelque sorte substitutive de l’OTAN ou de l’UEO au profit de l'OUA. Les forces d'occupation devront donc libérer le territoire du Congo-Zaïre. En revanche, si des mouvements purement locaux venaient à cristalliser leurs prétentions hégémonistes ou secessionistes,l'opération devra s'assurer de leur neutralisation pure et simple.

La réhabilitation du Congo-Zaïre est une question essentielle à  laquelle il convient certainement d'accorder du prix. D'où la nécessité de la refondation d'une armée nationale,patriotique et citoyenne,forte et opérationnelle dotée d'une capacité de défense active et réactive. Cette exigence est d'autant plus importante que seule la résolution définitive de cette question pourrait permettre de restabiliser la sous-région. Il n'est par ailleurs pas douteux que le Congo-Zaïre, par sa position géographique stratégique, a vocation à  jouer un rôle moteur dans le rétablissement de la paix dans la sous-région. De ce point de vue, la mise en Å“uvre des accords de Lusaka modifiés, en tenant compte des éléments propres à  la souveraineté du Congo-Zaïre, devra s'accompagner d'une politique systématique de libération du territoire national. Il faudra donc agir sur les deux fronts en faisant appel à  nos partenaires historiques qui n'ont jamais dénié l'intérêt de la restauration d'un Congo-Zaïre uni et entier. Car, ce dont il s'agit, c'est bien d'assurer au Congo-Zaïre la place et le rôle qui lui reviennent dans une région des grands lacs à  construire : un Congo-Zaïre puissant économiquement et commercialement, actif sur le plan international, capable d'assurer sa propre défense, fécond et divers dans sa culture. Ce Congo-Zaïre-là  sera d'autant plus attentif aux autres peuples qu'il sera plus sûr de lui-même.

Nos priorités visent à  assurer la sécurité du Congo-Zaïre sur le plan externe comme sur le plan interne, à  engager dans les meilleures conditions possibles une conférence intergouvernementale sur la sécurité, la paix et la coopération dans la région des grands lacs, à  lancer un PACTE de STABILITE pour la région des grands lacs et de l'Afrique centrale, à  apporter le soutien du Congo- Zaïre au processus de paix en Angola, au Congo-Brazzaville et au Soudan.

Le rétablissement de la paix et de la sécurité dans la région des grands lacs et en Afrique centrale constitue lui même une réponse aux conflits qui ont ruiné nos pays. Aucun de nos pays ne peut prétendre, seul, à  une défense sérieuse de son indépendance. Aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les problèmes que lui pose l'économie moderne. A défaut d'une paix librement consentie, nos pays s'exposent à  une "pacification" forcée et coercitive par l'intervention des forces extérieures.

L'UNIR MN est animée par une hantise : plus jamais de guerres entre les pays de l'Afrique centrale. Ces tragédies ne s'expliquent que par l'accumulation des haines ou bien des ignorances, par le refus d'un dialogue vrai, par une négligence totale de ce qui se passe autour de nous, africains. Afin de préserver la paix dans notre région, de préserver les libertés de l'individu, de bâtir les relations diplomatiques sur le respect de l'égalité souveraine de nos Etats, notre remède est simple : engager nos pays dans un engrenage de solidarités et coopérations qui rende impossible le retour aux vieux démons.

L'UNIR MN préconise la mise en place d'une politique des alliances avec les pays de la région des grands lacs après la guerre. Il s'agit d'une véritable Ostpolitik en direction de l'Ouganda, du Rwanda, du Burundi et de la Tanzanie. Le Congo-Zaïre partage ses frontières à  l'Est avec ces quatre pays voisins. Ses populations commercent volontiers avec les habitants de ses Etats ; parfois même l'économie de certaines régions frontalières est intimement liée à  celle du voisin. L'orientation vers l'Est ou politique de l'Est est donc fondée sur la volonté de bâtir une paix durable, mais aussi sur le sentiment que la reconstruction des régions dévastées ne peut résulter que d'un effort commun. Cette orientation vers l'Est doit rencontrer l'adhésion de tous les peuples de la région des grands lacs. Il faut prendre garde de ne pas laisser s'installer chez les populations de cette région une sorte de refus de l'autre. Cette politique de l'Est comporte deux volets :

  1. La relance de la coopération économique dans le cadre de la Communauté Economiques des Pays des Grands Lacs (CPGL).
  2. L' instauration d'une coopération en matière de défense et de sécurité territoriale. Il s'agit de mettre en place des mécanismes de contrôle et de surveillance de nos frontières communes afin d'éviter et de prévenir toute ménace contre la paix dans la région, de coordonner nos actions contre le terrorisme régional et le crime organisé.

C'est une grande ambition, un objectif qui peut paraiÌ‚tre à certains irréalisable, en tout cas de treÌ€s longue haleine ; il exigera un persévérant effort. Il ne sera peut-eÌ‚tre pas plus aisé d'harmoniser des intéreÌ‚ts politiques qui ont été fabriqués par quatre années de combats militaires,d'influences diplomatiques,d'inimitiés, parfois de haines entre nos peuples ; et pourtant, il faudra bien le faire.