Que tous les peuples de notre espace reÌgional soient animeÌs de volonteÌ reÌelle de paix : la guerre, l'inimitieÌ doivent appartenir deÌsormais au passeÌ.
Tous les Etats, impliqueÌs dans la crise des Grands-lacs, ont chacun à son tour et en son temps, profiteÌ de l'effondrement du Congo-Zaïre. La crainte de notre puissante renaissance fit reculer ensemble l'aviditeÌ et l'envie de certains de ces Etats qui voyaient et voient encore aujourd'hui dans le morcellement et le partage, aussi eÌtendu que possible de notre pays, la meilleure protection contre un releÌ€vement futur. Leur conscience inquieÌ€te et la crainte qu'ils ont de la force de notre peuple sont le ciment le plus durable qui, aujourd'hui encore, tient unis les membres de cette coalition. Le roÌ‚le neÌfaste que les deÌtenteurs du pouvoir actuel au Rwanda, aiguillonneÌs par leur soif leÌgitime de vengeance contre les hutus geÌnocidaires, jouent dans l'areÌ€ne politique congolais, est consideÌreÌ par d'aucuns comme un acharnement contre l'existence meÌ‚me de la nation Congo-Zaïroise et deÌchaiÌ‚nera un jour, si l'on n'y prend pas garde, contre eux tous les esprits vengeurs d'une geÌneÌration qui aura reconnu dans leur politique le projet de l'extinction de notre patrie. Le fait aussi que chacun de ces Etats se sent viseÌ et menaceÌ par notre renaissance n'arrange pas notre situation.
La psychose zaïrophobe geÌneÌrale que la propagande de guerre à la suite du geÌnocide au Rwanda a deÌveloppeÌe artificiellement dans les autres pays de la reÌgion existera fatalement tant que le Congo-Zaïre n'aura pas, par la renaissance chez notre peuple de la conscience nationale, recouvreÌ les traits caracteÌristiques d'un Etat qui joue sa partie sur l'eÌchiquier africain et avec lequel il est possible de jouer. Si nous voulons reÌussir la renaissance de notre pays, nous devons nous en tenir d'une façon ineÌbranlable au but de notre politique reÌgionale : assurer au peuple du Congo-Zaïre le territoire qui lui revient et un Etat fort. Et cette action est la seule qui devant Dieu et notre posteÌriteÌ congo-zaïroise, justifie de faire la paix avec la ligue de nos ennemis. Seulement, on ne fait pas une politique de reÌconciliation et d'alliance objective en s'attardant sur les froissements passeÌs. Cette politique d'alliance ne sera feÌconde que si nous profitons des leçons donneÌes par notre histoire reÌcente. L'expeÌrience que nous vivons depuis mai 1997 devrait alors nous avoir appris que les alliances noueÌes pour la poursuite de buts et objectifs neÌgatifs souffrent de faiblesse congeÌnitale. Les destineÌes de peuples de notre espace reÌgional ne seront solidement soudeÌes que lorsque nous aurons en vue un succeÌ€s commun, sous la forme d'acquisitions, de reÌalisations communes dont profitera chacun de nos peuples.
Mais peut-on, en principe, contracter alliance objective et sinceÌ€re avec la ReÌpublique DeÌmocratique du Congo actuelle ? Un Etat qui cherche dans une alliance un moyen pour seÌcuriser et deÌvelopper son pays, peut-elle s'allier à un Etat dont les dirigeants politiques ont, depuis des anneÌes, donneÌ l'image de la plus lamentable incapaciteÌ, de la laÌ‚cheteÌ politicienne et chez lequel la grande majoriteÌ de la nation aveugleÌe par des pseudo doctrines religieuses et pacifistes, trahit son propre peuple et son propre pays de la façon la plus pitoyable ? Est-ce qu'un Etat seÌrieux dans notre espace reÌgional peut espeÌrer actuellement eÌtablir des rapports viables et avantageux pour son avenir avec la ReÌpublique DeÌmocratique du Congo, dans la conviction qu'il pourra un jour combattre en commun avec elle pour deÌfendre des inteÌreÌ‚ts communs, lorsque le Congo DeÌmocratique n'a visiblement ni le courage, ni l'envie de lever un doigt pour deÌfendre sa propre vie, sa simple existence ? Est-ce qu'un Etat digne contractera une alliance, valable pour la bonne fortune avec un Congo dont les manifestations les plus caracteÌristiques sont une serviliteÌ rampante à l'eÌgard de l'occupant et l'eÌtouffement ignominieux des vertus patriotiques ; avec un Congo qui n'a plus, par la faute de la conduite de ses dirigeants politiques, rien de grand ; avec une classe politique qui ne peut se vanter de jouir de la moindre estime aupreÌ€s de ses concitoyens, de sorte qu'il est impossible aux eÌtrangers d'avoir une grande admiration pour eux.
Non ! Aucun Etat seÌrieux qui tient à sa reÌputation et qui cherche dans une veÌritable alliance quelque chose de plus que des subsides pour des politiciens et hommes d'affaires affameÌs de butin, ne s'alliera pas avec la ReÌpublique DeÌmocratique du Congo d'aujourd'hui. Notre incapaciteÌ actuelle à deÌfendre notre cause nationale, à deÌfendre notre sacreÌe existence territoriale est la raison profonde de la solidariteÌ existant entre nos occupants et colons noirs d'Afrique. Comme la ReÌpublique DeÌmocratique du Congo ne se deÌfend jamais que par quelques protestations enflammeÌes de protagonistes de notre paysage politique actuel, comme le reste de la communauteÌ internationale n'a pas de raison pour combattre pour notre deÌfense, comme le Bon Dieu que nous prions sans cesse, a pour principe de ne pas affranchir les peuples sans courage, sans cause patriotique clairement deÌfinie et sans leader qui incarne la cause de la patrie, meÌ‚me les peuples qui n'ont aucun inteÌreÌ‚t direct à notre complet aneÌantissement n'ont rien d'autre à faire que de prendre part à l'entreprise de spoliation de notre patrimoine existentiel visant au maintien d'un eÌtat de lent deÌpeÌrissement de notre Nation. Il va donc de soi que personne ne voudra s'allier sinceÌ€rement et objectivement avec la ReÌpublique DeÌmocratique du Congo actuelle. Il n'y a pas un Etat sinceÌ€re dans notre reÌgion qui osera enchaiÌ‚ner son sort à celui d'un Congo dont les hommes politiques ne peuvent inspirer la moindre confiance.
Pour que notre nation renaisse, il est neÌcessaire que notre peuple remonte dans l'estime des autres peuples et cette reÌhabilitation deÌpend de l'existence, au Congo-Zaïre, d'une autoriteÌ gouvernementale leÌgitime qui soit le forgeron de la conscience nationale, patriotique et citoyenne.
Quand notre peuple aura un gouvernement leÌgitime qui verra là sa mission sacreÌe, il ne se passera pas cinq ans avant qu'une direction hardie donneÌe à la politique de reconstruction de notre pays ne trouve à s'appuyer sur la volonteÌ aussi hardie d'un peuple courageux, travailleur et alteÌreÌ de liberteÌ. Notre jeune mouvement politique a là une mission à remplir. Il doit enseigner à notre peuple à ne pas arreÌ‚ter son regard sur les petites choses et à ne consideÌrer que les plus importantes, à ne pas disperser ses efforts sur des objets secondaires, et à ne pas oublier que ce pour quoi nous avons aujourd'hui à lutter, c'est l'existence meÌ‚me de notre peuple, c'est la renaissance de notre patrie, c'est la reconstruction de notre pays. Il se peut que nous ayons à nous imposer de durs sacrifices. Mais ce n'est pas une raison pour refuser d'eÌcouter la raison et pour nous disputer avec le monde entier. D'ailleurs notre peuple n'a pas moralement le droit d'accuser l'attitude qu'observe le reste de l'Afrique et du monde à son eÌgard, tant qu'il n'aura pas demandeÌ à ses dirigeants politiques de faire un examen de conscience sur leur attitude dans la crise qui saigne notre pays. Ce n'est pas faire preuve d'une conviction respectable que de lancer de loin des injures et des protestations contre le Rwanda, l'Ouganda, le Burundi, l'Angola, le Zimbabwe, etc., et de ne pas demander des explications aux congolais qui, en se mettant à la solde de nos occupants et colons, nous ont arracheÌ nos armes, briseÌ moralement et physiquement nos forces et ont vendu pour rien la patrie reÌduite à l'impuissance. Mon point de vue est simple, l'ennemi ne fait que ce qui eÌtait à preÌvoir. Son attitude et ses actes devraient nous servir de leçon. Si l'on n'est pas capable de s'eÌlever à la hauteur de ce point de vue, on doit se rendre compte qu'il n'y a plus qu'à deÌsespeÌrer, du moment qu'il faut renoncer à pratiquer à l'avenir toute politique de paix dans notre espace reÌgional. Car, si nous ne voulons pas faire la paix avec le Rwanda, parce qu'il occupe tout notre espace oriental, ni avec l'Ouganda qui occupe le nord ouest-est de notre pays, ni avec l'Angola qui dit-on seÌcurise le reÌgime de Kinshasa, il ne nous restera plus d'autre allieÌ possible dans notre espace reÌgional que le fraternel Congo Brazzaville. Il est douteux que cette façon d'agir soit treÌ€s favorable aux inteÌreÌ‚ts de notre peuple. Et je sais que ni le Congo-Zaïre, ni le Rwanda, le Burundi, l'Ouganda comme tous les Etats de notre espace reÌgional ne perdraient rien, au contraire, à s'ouvrir sur une socieÌteÌ plus large. Mais nous sommes encore loin de compte et notre reÌgion est toujours deÌchireÌe. Afin de reÌtablir et de preÌserver la paix et la seÌcuriteÌ dans notre espace reÌgional, de preÌserver les liberteÌs de l'individu, de baÌ‚tir de nouvelles relations diplomatiques sur le respect de l'eÌgaliteÌ souveraine de nos Etats, nous devons engager nos pays dans un engrenage de solidariteÌs et de coopeÌrations qui rende impossible le retour aux vieux deÌmons.
Aussi si la nation Congo-Zaïroise veut mettre fin à un eÌtat de choses qui menace de la faire disparaiÌ‚tre du sol de notre espace reÌgional, elle ne doit pas retomber dans l'erreur des politiques commise avant l'agression de notre pays en octobre 1996 et se faire l'ennemi de tous les pays voisins ; elle doit conclure une paix victorieuse avec l'ensemble des Etats de notre espace reÌgional. Et si cette paix de braves avec nos ennemis a pour condition des sacrifices faits sur d'autres points, les futures geÌneÌrations de notre peuple nous les pardonneront. Elles sauront d'autant mieux appreÌcier notre affreuse deÌtresse, nos profonds soucis et la peÌnible deÌcision prise alors, que le reÌsultat de nos efforts sera plus eÌclatant.
Nous devons aujourd'hui nous laisser guider par cette ideÌe maiÌ‚tresse que notre Etat ne peut reÌcupeÌrer totalement nos terres occupeÌes que lorsque nous aurons d'abord reconquis notre indeÌpendance politique et la puissance de Kinshasa notre meÌ€re-patrie. Rendre possibles et assurer cette indeÌpendance et cette puissance par une sage politique d'alliances, telle est la premieÌ€re taÌ‚che que doit remplir, en ce qui concerne la politique reÌgionale, un gouvernement eÌnergique.
Quand on examine les possibiliteÌs d'alliances que l'eÌpoque actuelle offre pour garantir l'instauration d'un Etat fort, indeÌpendant et seÌcuriseÌ au Congo-Zaïre, on est vite convaincu que tout ce que nous pouvons faire pratiquement, en fait d'alliance, est de nous rapprocher de tous les Etats de l'Afrique Centrale et Orientale par la mise en place d'une organisation sous-reÌgionale en matieÌ€re de seÌcuriteÌ et de deÌfense commune. La reÌalisation de cette grande ambition deÌpend du reÌtablissement et du maintien de la paix dans la reÌgion des Grands-lacs.